SCENE 48 : « Lady Héroïne »
SCENE 48 : « Lady Héroïne »
VALENTIN, ROBERTO (Sous les traits de Juliette), SYLVESTRE
Valentin passe le plumeau dans la pièce en dansant la béguine…
ROBERTO, entre, sous les traits de Juliette (Robe bleue à fleurs surannée)
M’accorderais-tu cette danse, beau gosse ? (Elle se dirige vers Valentin et se pend à son cou)
VALENTIN, danse la béguine avec Juliette
Mais d’où sortez-vous, jolie poupée ? En principe, l’enceinte du château est interdite à tous les invités sans exception pendant la Garden Party.
ROBERTO (Sous les traits de Juliette), danse la béguine avec Valentin
Voyons, voyons, je ne suis pas une invitée comme tout le monde, beau gosse !... je suis Lady Héroïne la « méga blonde ».
VALENTIN, danse la béguine avec Juliette
C’est étonnant ?! Vous me rappelez la « super ex femme » de Monsieur Louis qu’il tenait dans ses bras à longueur de journée et dont j’étais follement amoureux.
ROBERTO (Sous les traits de Juliette), danse la béguine avec Valentin
Tu es un chou, beau gosse ! Tu es très entreprenant avec les jolies poupées dans mon genre. Dieu sait que tu danses divinement bien la béguine des antilles.
VALENTIN, s’arrête de danser
C’est incroyable, tu ressembles trait pour trait à sa première femme.
ROBERTO (Sous les traits de Juliette)
Surtout, ne t’arrête pas de danser, beau gosse ! Tu aimes danser, n’est-ce pas ?
VALENTIN
J’aime surtout danser en travaillant, cela m’encourage beaucoup dans mes efforts.
ROBERTO (Sous les traits de Juliette)
Un exercice motivant, en effet.
VALENTIN
Et Dieu sait que les exercices ne manquent pas lorsqu’on travaille au service de Monsieur Louis. Surtout en ce moment avec la crise.
ROBERTO (Sous les traits de Juliette)
Je suppose que Monsieur Louis est le propriétaire du château de Versailles ?
VALENTIN
Il s’agit de l’héritage de son oncle d’Amérique que personne ne connaît d’ailleurs. Monsieur Louis a la folie des grandeurs depuis qu’il a emménagé au château avec sa ravissante et huitième épouse.
ROBERTO (Sous les traits de Juliette)
Le château de Versailles doit demander beaucoup d’entretien !?
VALENTIN
Ne n’en parlez pas ! L’entretien des sols aux plafonds me prend 24 heures sur 24, sept jours sur 7… sans compter le repassage, la cuisine et le jardinage… c’est beaucoup trop pour un seul homme. Je n’en vois jamais le bout. Je n’en peux plus. Et puis, j’en ai assez de me faire engueuler !
ROBERTO (Sous les traits de Juliette)
Vous avez raison : « On n’est pas là pour se faire engueuler ». Je suis vraiment navrée pour vous.
VALENTIN
Je commence à regretter la cabane de Monsieur au fond du jardin avec vue sur la montagne.
ROBERTO (Sous les traits de Juliette)
J’en suis très peinée.
VALENTIN, danse la béguine avec Juliette
J’ignore si je vais rester encore longtemps au service de Monsieur Louis.
ROBERTO (Sous les traits de Juliette)
Monsieur Louis ferait bien d’embaucher du personnel.
VALENTIN
Depuis la crise, c’est l’effet contraire qui se produit : non seulement Monsieur réduit son personnel mais encore il change le statut de celui-ci qui devient un contrat « CSJEP ». Les droits des travailleurs s’écroulent. Si cela continue, je démissionne.
ROBERTO (Sous les traits de Juliette)
Où iriez-vous ? Monsieur Louis est votre seule famille.
VALENTIN
Ma vraie famille se trouve en Guadeloupe. J’avoue qu’elle me manque beaucoup. (Il s’arrête de danser) Je suis désolé, Mademoiselle, je suis obligé de vous mettre à la porte. J’ai reçu des consignes,… vous devez quitter le château immédiatement. Laissez-moi vous raccompagner jusqu’à la sortie…
ROBERTO (Sous les traits de Juliette)
Un instant, beau gosse,… savez-vous qu’il ne faut jamais faire attendre une femme ?... vous allez manquer votre rendez-vous galant.
VALENTIN
Je ne sais pas si je dois m’y rendre !? (Un temps) A propos, comment savez-vous pour mon rendez-vous galant ?
ROBERTO (Sous les traits de Juliette)
C’est mon petit doigt qui me l’a dit !... mais non, idiot,… je l’ai deviné. Je présume qu’un beau gosse comme vous n’est jamais seul.
VALENTIN
Vous savez… dans mon métier, on n’a pas le temps de faire des rencontres.
ROBERTO (Sous les traits de Juliette)
Vous avez un emploi stable, c’est déjà ça. Estimez-vous heureux. De nos jours, ce n’est pas évident avec la précarité.
VALENTIN
Bien trop stable à mon goût. Et c’est justement là où le bas blesse, Mademoiselle,… le fait de travailler 24 heures sur 24 au service de Monsieur fait que les femmes ne restent jamais longtemps avec moi. C’est un peu comme le métier de routier : je suis constamment sur les routes. Les femmes ne supportent pas cette vie au bout de quelques années de mariage, elles ont l’impression d’élever seules leurs enfants. Alors, que voulez-vous,… au fil du temps, j’ai appris à vivre sans elles.
SYLVESTRE, (fort accent du midi de la France) surgit à ce moment là, une sacoche avec lui
Ça par exemple ! Ne me dis pas que c’est vraiment toi, Juliette ?
FIN DE LA SCENE 48